Festival d´opéra de Munich: le charisme de Waltraud Meier

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Waltraud Meier
Waltraud Meier

La Kammersängerin Waltraud Meier nous a offert hier soir au Théâtre national de Munich un récital de lieder d´une qualité exceptionnelle, en remplacement du récital annoncé de Diana Damrau, qui a été contrainte d´annuler en raison de problèmes de santé. Alors que Waltraud Meier a récemment fait des adieux à la scène remarqués à Munich pour le rôle d´Isolde et à Berlin pour celui de Kundry, ce remplacement de dernière minute a été ressenti comme une grande chance par le public munichois qui a réservé un accueil enthousiaste à la grande dame soprano wagnérienne. Les lieder étaient accompagnés au piano par un des meilleurs spécialistes du piano d´accompagnement, Joseph Breinl, qui travaille de concert avec Waltraud Meier depuis une douzaine d´années.

Pour l´occasion Waltraud Meier a choisi ces Lieder de Mahler qui ont contribué à créer sa légende: les Kindertotenlieder, des Lieder extraits de Des Knaben Wunderhorn et les Rückert-Lieder, ainsi que le cycle des Wesendonck-Lieder de Wagner. Ce programme à la composition intelligente passe en première partie de l´expression douloureuse et triste et de la montée progressive en tension des Kindertotenlieder, à l´expression amoureuse romantique baignée du sentiment de la nature et assombrie par la perspective de l´impermanence et de la mort des lieder wagnériens écrits sur les poèmes composés par Mathilde Wesendonck. La seconde partie est plus joyeuse avec d´abord le monde naïf et légendaire du Knaben Wunderhorn de Friedrich Rückert, dont Waltraud Meier met en valeur la langue raffinée et gracieuse par les jeux sur la sonorité des mots et dont elle nous livre avec une grande délicatesse les tendresses, l´intimité et les sentiments pudiques. Ils sont suivis des RückertLieder que Mahler a composé au temps de l´épanouissement de son amour pour Alma, avec une musique qui en exprime la tendresse et l´intimité ( «Liebe mich immer, dich lieb’ich immer, immerdar»). Par cette composition du programme sensible aux tensions et au rythme, on comprend, s´il faalit y insister, combien Waltraud Meier cherche à atteindre la vérité des oeuvres, au service desquelles elle se met toute entière. Le travail de cette grande dame de la chanson est d´une extrême rigueur, l´expression de chaque mot, de chaque syllabe, de chaque consonne finale est travaillée avec une technique des plus remarquable toute au service du sens. C´est toute une palette d émotions et de sentiments humains que Waltraud Meier nous communique aujourd´hui avec son sens de la précision dans l´expression des variations affectives, avec une diction et un phrasé impeccables, une voix ferme et les ressources d´un soprano dramatique d´une grande souplesse qui a su garder les couleurs du mezzo.

Au terme de cette soirée à l´écoute quasi religieuse, le public a réservé une immense ovation à Waltraud Meier, qui a donné trois rappels en progression d´intensité: une aria de Mozart, Von ewiger Liebe de Brahms et en apothéose, Der Erlkönig de Schubert.

Luc Roger

 

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