Maria Stuarda à l’Opéra de Marseille

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Maria Stuarda à l’Opéra de MARSEILLE. Photo : Christian DRESSE
Maria Stuarda à l’Opéra de MARSEILLE. Photo : Christian DRESSE

Entre les 4 représentations de Anna Bolena, s’est intercalée une unique Maria Stuarda elle aussi en version concertante. L’occasion de faire le parallèle entre deux œuvre quasi semblables historiquement parlant, mais pourtant bien différentes bien qu’écrites par le même compositeur Gaetano Donizzetti.

L’occasion surtout d’entendre d’autres interprètes, à l’exception de la basse Mirco Palazzi qui ayant remplacé Marco Vinco se paye le luxe de chanter samedi soir dans Bolena et dimanche après-midi dans Stuarda : quel exploit et quel courage !

Tout le monde attendait la prise de rôle – peut-être un peu tardive – d’Annick Massis en Stuarda, mais l’évènement fut créé par sa « rivale » sur scène la jeune mezzo-soprano Silvia Tro Santafé. On a cru qu’un ouragan avait pénétré dans l’Opéra de Marseille dès les premières paroles. Un chant puissant, précis, percutant, vif comme l’éclair mais pourtant très discipliné. Une voix saine l’autorisant à se jouer avec facilité de tous les pièges de cette partition. Rien ne semble lui faire peur et il faut espérer qu’elle saura conserver longtemps cette santé vocale et cette énergie.

On pensait qu’elle n’avait fait qu’une bouchée de son « adversaire » (pour reprendre une image sportive puisqu’à certains moments on avait l’impression d’assister à un match vocal), mais c’était sans compter sur l’expérience et la maturité d’Annick Massis. Une technique quasi infaillible a su venir épauler quelques légères difficultés rencontrés au cours de l’ouvrage, sans doute à un excès de nervosité, prise de rôle oblige. Néanmoins on a pu retrouver des vocalises aériennes et un souffle infini qui sont les qualités premières de cette artiste, sans oublier un timbre splendide et raffiné reconnaissable entre mille : un joli moment.

Pour rester dans l’énergie, on ne peut que se féliciter d’avoir pu entendre ce jeune ténor italien Enea Scala, dans le rôle de Roberto. Il ne s’agit pas seulement de volume sonore dans son chant, il y a aussi une ligne et une expressivité qui le mettent particulièrement en valeur. Le timbre est beau et lui aussi semble s’amuser des difficultés : à revoir.

Pour ce qui est de la personnalité et de l’expressivité, le baryton Florian Sempey n’en manque pas. Non seulement le timbre est somptueux, rare, mais il possède déjà (il n’a que 28 ans) une maturité et un sens innée du légato qui font qu’on le remarque immédiatement. Son chant coule, n’est jamais heurté, et s’exprime d’une façon extraordinaire dans le registre haut sans pour autant négliger des graves impressionnants. Il est tout à fait dans la continuité de nos grands barytons français tels que Robert Massard ou Ernest Blanc et nous ne pouvons que lui souhaiter une carrière identique.

Des graves, la basse Mirco Palazzi en possède à revendre mais dans cette œuvre il fait également appel à des aigus qui sont particulièrement intéressants et même surprenants pour cette tessiture.

Dans un rôle plus effacé, mais avec notamment un air d’une grande difficulté, une autre belle découverte en la personne d’Aurélie Ligerot dans le rôle travesti de celle/celui par qui tout arrive : à revoir elle aussi.

Enfin, toujours une excellente prestation du chœur et de l’orchestre de l’Opéra de Marseille sous la direction à la fois énergique mais contrôlée du Maestro Roberto Rizzi Brignoli.

Bref, vive les versions concertantes lorsqu’elles sont aussi bien distribuées.

Corinne Le Gac

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